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06 août 2019

Au delà de la collapsologie (LEM 1131)


                     Feuillets de systémique médicale (8)


Les médecins savent, et connaissent la gravité de, ce qu’est un collapsus (1). En accolant ce latinisme clinique au suffixe grec habituel de logos, une branche de la connaissance du système général dans lequel nous vivons occupe le devant de la scène. La collapsologie (2). Cette nouvelle science, cherchant à fédérer d’autres branches de la connaissance objective  (3 )est fondée sur une idée. Celle que nous vivons l’effondrement de la civilisation industrielle. Cette impression, car c’est quelque chose de l’ordre du ressenti, est largement partagée, induisant une inquiétude diffuse. Ce fameux progrès, cette expansion liée à un phénomène de croissance sans limite, nous n’y croyons plus. Ceux qui en font leur fonds de commerce pour justifier leurs actions pour notre intérêt perdent définitivement  leur crédibilité. La vieille notion de démocratie vacille.

   Il est vrai que la science elle-même, en transformant en dogme définitif la théorie du Big Bang, semble distiller l’idée que notre univers est condamné à une dispersion inévitable entrainant de plus en plus de désordre. La fameuse entropie. Il est également exact que les hommes  sont depuis toujours taraudés par la question du début et de la fin des temps. Notre enfance en a été baignée avec le prophète aveugle de Tintin préchant dans les rues de New York, dans l’album L’île mystérieuse.
La dernière partie du Nouveau Testament (4), comme une sorte de conclusion  indigeste à notre siècle, se nomme l’Apocalypse du Christ. Notre culture n’en retient que  la peinture effrayante de la destruction brutale de la terre et de ses habitants. Situation apocalyptique dit-on souvent. « Apocalpyse now» titrait en 1979 le fim de Francis Ford Coppola  fustigeant  la guerre du Vietnam.
   Or, les mots sont têtus, ils savent exactement ce qu’ils veulent nous signifier. L’apocalypse n’est que le dévoilement, la révélation d’une chose jusque là invisible à nos yeux. Alors, le mouvement dénommé la collapsologie décrit bien ce qui lui semble un effondrement dont nous constatons autour de nous les effets immédiats et les conséquences dramatiques prévisibles

   Mais les collapsologues limitent leur champ de vision à la seule civilisation industrielle, au modèle économique dominant de la planète. Ils se disent systémiciens, ce qui n’est pas criticable ici. Mais leur système est solidement enfermé dans ce qui est matériel. Comme si c’était la frontière absolue et définitive de la réalité, ce qui n’est qu’une croyance et non un acquis scientifique. Les collapsologues, n’en déplaise à Yves Cochet et ses amis suiveurs, ne sont porteurs d’aucune révélation fondamentale capable d’insuffler une façon de vivre et d’être que nous n’avons pas. Ou, soyons optimistes, pas encore.
   Là se fait jour une question fondamentale soigneusement laissée en silence. Faute de mieux - qui serait fort bienvenu ici- elle peut être formulée de la façon suivante. Les méthodes rationnelles des connaissances scientifiques sont-elles capables de révéler ( comme une apocalyse, nous l’avons vu) la totalité du réel accessible au cerveau de l’homme ? Notre système de fonctionnement, puisque nous parlons ici de systémique, ne fait-il pas appel, depuis nos ancêtres les plus lointains, à une autre dimension de ce qui est, totalement complémentaire de nos sciences admirables ? Quitte à heurter certaines sensibilités, je ne peux pas faire l’impasse intellectuelle de la spiritualité (5).

Notes:
   
                                                                                          
 (1) Définition CNTRL COLLAPSUS, subst. masc.
A.− PATHOL. Chute subite des forces avec ralentissement des fonctions vitales provoquant un état intermédiaire entre la syncope et l'adynamie dû à une diminution de l'excitabilité du cerveau. Tomber en collapsus; collapsus général, musculaire .

(2) https://fr.wikipedia.org/wiki/Collapsologie


(3) Rien moins qu’un concours transdisciplinaire entre écologie , économie, anthropologie, sociologie, psychologie, biophysique, biogéographie,
agronomie, démographie, politique, géopolitique, archéologie, histoire, futurologie, santé, droit et... art.



(4) Ce thème a déjà été développé par des prophètes juifs comme Ezéchiel au VIème siècle avant notre ère.

(5) Mot-piège s’il en est, tant il est mis aux sauces les plus variées, qui méritera ici des développements ultérieurs.

                                      François-Marie Michaut


Os court ;
«   La spiritualité reconnaît la lumière divine qui brille en chacun de nous. Elle n’appartient à aucune religion en particulier, mais à tout le monde.» 
 Mohammed Ali, (boxeur 1942-2016)


Lettre d'Expression médicale

LEM n° 1131

 5 août 2019


2 commentaires:

  1. Si je comprends bien vous ajoutez une inconnue a une équation qui en comporte déjà beaucoup .
    Nous butons contre un mur que nous voyons pas comme l'abeille bute contre la vitre.
    La question est de savoir comment l'on passe du materiel a l'immateriel .
    De notre cerveau a la pensée .
    Pensée qui est structuré par des mots qui eux sont bien matériel .A ce stade généralement je prends une Suze!

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    Réponses
    1. Votre réponse est courageuse, tant le sujet est épineux.
      Plafond de verre entre le matériel et l'immatériel : c'est ce que nous voyons en permanence. Au moins pour ceux qui admettent l'idée que l'immatériel est un domaine du cerveau humain méritant d'être étudié, et critiqué avec rigueur comme savent le faire les scientifiques dans leur discipline.
      Les gens qui sont des artistes ne cessent de nous crier que le passage du matériel à l'immatériel est une capacité du cerveau humain. Cf le célèbre tableau de Magritte : Ceci n'est pas une pipe.
      Si déjà nous prenons conscience de ce mur, un pas énorme est franchi. Parce que la curiosité humaine est sans limite et qu'alors chacun cherche, à sa façon,et avec tous les risques de fausse route que cela comporte ce qu'il peut bien y avoir -ou pas- derrière ce mur.

      Pouvons nous prendre ensemble une Suze ? Parce que la bouteille entamée ne s'use qui si on se sert...
      Pirouette verbale juste pour illustrer que des "mots qui sont bien matériels" nous font un pied de nez pour dire beaucoup plus que leur sens premier.

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