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27 juin 2021

Lettre à Marie Ahyerre
 (LEM 1229)

  


    Nos itinéraires, très inégaux en durée, ne se sont jamais croisés. Vous avez 23 ans, vous étudiez à Bordeaux et vous avez obtenu la plus forte note au concours national de l’internat. Superbes capacités cognitives jointes à une remarquable maturité.
    Ce que je trouve le plus époustouflant est l’affirmation tranquille de votre choix de la médecine générale pour trouver votre voie dans l’usine à gaz des disciplines médicales. Pour vous, c’est clair et net : vous voulez être généraliste, pas dermato, ophtalmo, chirurgien esthétique ou radiologue comme vos prédécesseurs. Vous le déclarez sans détour aux journalistes qui, visiblement, ne le comprennent pas.

   Vous êtes bien placée pour constater que la médecine générale est considérée par l’immense majorité des porte-drapeaux des médecines hautement spécialisées comme de qualité intrinsèque inférieure (1). Les médecins de famille ? Juste bons à s’occuper de pathologies bénignes, pour ne pas dire spontanément guérissables.
    Votre choix témoigne de votre liberté d’esprit : la vraie médecine n’est pas celle, très cloisonnée, des seuls organes à la recherche des pathologies les plus graves. Elle est, à l’image des vivants, celle de la durée. Ensemble pour le meilleur comme pour le pire selon les accidents comme les joies de la vie.

    Vous êtes jeune. Nos experts (2) prévoient que tout risque fort d’être bousculé dans nos manières de vivre dans 30 ans. Vous aurez alors 53 ans, le temps de la pleine maturité professionnelle, et vous aurez à prendre soin, là où vous serez, de cette humanité atteinte dans sa capacité de demeurer en vie.
Que vaudront alors les fleurons technoscientifiques de nos hyperspécialistes ?
La vie, celle que nous nous sommes acharnés depuis si longtemps à construire, qui pourra l’aider à ne pas disparaitre par incapacité d’adaptation ?
    
   Vous voyez, et je n’ai aucun titre pour vous donner le moindre conseil, votre responsabilité est considérable. Vous méritez amplement le plus grand respect pour oser prendre à bras le corps ce qui vous parait de la plus haute qualité en résistant aux sirènes de l’immédiat et du clinquant.

         Alors, si vous me le permettez, belle vie à vous et restez qui vous êtes, quoi qu’il advienne sur votre chemin de vie.

                                                 François-Marie Michaut

_________________

Notes:

(1) On peut dater le début de cet ostracisme, inconnu de nombreux pays comparables, à la réforme Debré de 1958 qui créa les Centres Hospitaliers Universitaires.


(2) JIM du 24 juin 2021 : lien 


 

 
«   Il y a des médecins qui vous sauvent - et il y en a qui vous guérissent.»

      Sacha Guitry

 

 Lettre d'Expression médicale

LEM n° 1229 27 juin 2021   
 

23 juin 2021

Militantisme si peu scientifique (Exmed)



   Les médecins n’ont jamais cessé de débattre entre eux pour remplir leur mission au mieux au fil des époques. Alors quand des médecins, au nom de la science et de la santé, se comportent comme des militants, le mélange des genres devient extrêmement dangereux pour le public et... les professionnels qui cherchent librement. Sommes-nous contaminés par la technique marchande des influenceurs dans la prévention des maladies ?
     Voici, en italiques,  le message d’une consoeur amie qui mérite d’attirer toutes les attentions :

 Je ne sais pas si tu as vu cela, mais peut-être cela pourrait intéresser les médecins blogueurs.
  Si nous ne réagissons pas les sites de santé seront passés au peigne fin pour être censurés.
  Tout est expliqué ici : http://mypebs-en-question.fr/actus/infox.php
et ici : https://cancer-rose.fr/2021/06/22/linca-de-mauvaises-surprises-en-mauvaises-surprises/

C'est un scandale, il faut qu'on se réveille avant d'être muselés !

Texte en anglais aussi : http://mypebs-en-question.fr/actus/infox_en.php



François-Marie Michaut


Site Exmed 23 juin 2021

20 juin 2021

J’veux pas le savoir
 (LEM 1228)


    Au temps révolu  du service militaire obligatoire, tout le monde ne vivait pas cette phase de vie comme une partie de plaisir. Devenir homme de troupe supposait une formation assurée classiquement par un adjudant instructeur, grade ultime des sous-officiers d’active.
« La discipline faisant la force principale des armées, il importe que tout supérieur obtienne de ses subordonnés une obéissance entière et une soumission de tous les instants» dit l’article 1er du règlement de discipline des armées entre 1933 et 1966.

     Tout questionnement, empreint ou non de malice de la part des bleus, sur la faisabilité d’une injonction attirait un je-veux-pas-le-savoir de la part du gradé. La hiérarchisation galopante de tous nos rouages d’organisation a horreur des gens qui posent des questions (1). À un degré de plus, montrer qu’on ose répondre est une attitude risquée. Le silence rituel des classes d’école devant les professeurs en France surprend beaucoup les jeunes d’autres pays. Le confinement, retour à l’actualité, des attitudes mentales ou psychologiques laisse une trace profonde. Un silence des expressions comme si les masques avaient le pouvoir de bâillonner nos capacités de penser et de communiquer aux autres notre pensée quand elle ne peut pas s’appuyer sur un groupe de pression protecteur.

    Risque d’hypotrophie de notre dimension humaine déjà durement éprouvée depuis des années par la dictature technoscientifique (2) ?
L’hypothèse ne peut être écartée d’un haussement d’épaules. Quand les grandes idéologies s’effondrent devant les modes de vie qu’elles génèrent, comprendre enfin pourquoi et comment la réalité qu’elles fabriquent les met en échec devient une urgence vitale.
   Une urgence qui tourne le dos à notre volonté si confortable de ne pas vouloir savoir. L’urgence de connaitre ce que, justement, nous ne connaissons pas encore avec nos outils intellectuels de 2021, les produits à tout faire du numérique avec leurs solutions simplificatrices, les fameuses applis en tête.

                                               François-Marie Michaut

Notes:


(1) Toute question susceptible de perturber les rouages d’un pouvoir reconnu vous fait souvent taxer durablement, ou définitivement,  de «mauvais esprit», donc dépourvu de sérieux.



(2) Odile Marcel, Technoscience et thérapie, Site Exmed,
lien https://www.exmed.org/odmar.html



Os court :
«   La culture, ce n’est pas ce qu’il reste quand on a tout oublié, mais, au contraire, ce qui reste à connaître quand on ne vous a rien enseigné.»

 Jean Vilar (1912-1972, créateur du festival d’Avignon)

 Lettre d'Expression médicale

LEM n° 1228 20 juin 2021   


                                
                       
                                       
 

16 juin 2021


Les démasqués (Exmed)


    Que sommes nous devenus dans l’espace public sans nos masques imposés ? Avons-nous, les uns et les autres, changé durant l’épreuve prolongée du confinement ? Allons-nous même nous reconnaître face aux autres comme «avant» ?        


     Observateurs, à vos postes, nous avons certainement tellement à apprendre de ce temps nouveau  qui ne peut plus, quoi que nous fassions, être «comme avant».

François-Marie Michaut

  Exmed 16 juin 2021

13 juin 2021

BUT en BLANC
 ABUS (LEM 1227)

  


Des revendicateurs, ce n’est pas la devise.        
Au but, on a tous droit, quoi que certains nous disent.
Souvent les tirs au but ne sont pas tapés droits :
Ils manquent là leur but et on ne sait pourquoi.
Peindre le but en blanc n’aide pas à marquer,
Et s’il est tout en vers, le score est étriqué.
Pour atteindre le but, aller droit n’est pas tout ;
Il faut le dépasser, c’est le meilleur atout.

Avoir un but qui plaît abrège nos attentes.
Il devient point de mire et nous montre la pente.
Avoir la vie facile est un but difficile,
Mais n’avoir pas de but est cent fois plus futile.
Quand on n’a pas de but, sans boussole on navigue ;
La vie devient un jeu dont le bout nous intrigue.
    On bourlingue au hasard et toute honte bue,
Quand on arrive au but, juste on a survécu.    

Vivre serait le but ? Le début ? Le rebut ?        
Bonheur est récompense et non l’unique but !
Le but de notre vie est-il le ciel sur terre ?
Notre modernité entonne bien cet air.
    « Société » n’est qu’un jeu où chacun suit son but,
Un but jamais atteint mais qui laisse fourbu …
Celui qui touche au but, alors, il arrive où ?
La mort n’est pas le but, mais elle est bien le bout …

                    Jacques Grieu
  

Os court :
«  Ce n’est pas le but  qui est intéressant, ce sont les moyens pour y parvenir.»

 Georges Braque


 Lettre d'Expression médicale

LEM n° 1227 13 juin 2021   
 

07 juin 2021

Mots qui puent, mots qui tuent (LEM 1226)


   L’invention de l’imprimerie a été un des moteurs de la Renaissance en Europe. Les textes enfin sortis de la seule tradition orale ou des copies confidentielles pour les rares favorisés. Le seul animal doté de la capacité de langage articulé par sa physiologie fait ainsi un remarquable pied de nez au temps comme à l’espace.
   Enfin vint le réseau des réseaux avec sa toile numérique planétaire. Tout manipulateur de clavier dispose virtuellement d’une tribune d’expression sans limite. Plus besoin d’auteur patenté, plus besoin d’éditeur, plus besoin d’imprimeur, plus besoin de libraire.

Que faisons-nous de cet outil technique incapable d’oublier son contenu après quelques années d’utilisation intensive ? Un moyen d’ouvrir les esprits vers des connaissances jusquelà inaccessibles ? les pionniers en ont révé de ce «village planétaire» ( Marshal Mac Luhan, 1967).
Le libre-service des mots, fouété par l’illusion de la protection de l’anonymat a conduit, sous la protection très intéressée des réseaux sociaux, à l’explosion des mots utilisés comme des armes pour dominer les autres. Entendons ceux qui pensent autrement que soi, les pas comme nous, les gens vraiment bien. Rumeurs de stade, la machine collective catalysant le mimétisme cher à René Girard ( Des choses cachées depuis la fondation du monde, 1978) ne cesse de s’emballer. Odeur nauséabonde pour toute pensée refusant les attitudes simplistes des extrémisme de tout calibre. S’il ne s’agissait que de l’agacement olfactif de quelques sujets plus sensibles que les autres, cela n’aurait guère d’importance.
Mais, hélas, le passage à l’acte de cette violence des mots, des insultes et des menaces nous saute à la figure. Les anciens savaient bien que deux armées face à face ne pouvaient s’étriper qu’après s’être copieusement injuriés ( L’Iliade ). Ailleurs, tambours, peinture et danses de guerre étaient indispensables pour galvaniser les guerriers. Le passage de l’expression symbolique violente à la réalité de donner la mort à celui d’en face, connu ou inconnu, est trop familière à notre histoire pour qu’il puisse être nié.
Comment ne pas s’interroger quand une chaine publique de télévision propose sans hésiter à ses spectateurs leur «soirée meurtre». Comme un anodin divertissement ?
   Ceux qui soignent des malades savent l’importance des mots qui sont échangés. Ils peuvent soigner, ils peuvent soulager, ils peuvent  aussi contribuer à guérir, les mots et les gestes. Mais il peuvent aussi, hélas quand on n’y prête pas assez attention, conduire au désespoir et à la mort.
   Personne n’a le droit, sous quelque prétexte, toujours mauvais que ce soit, dire n’importe quoi à n’importe qui n’importe quand, n’importe où, n’importe comment . L’utilisation de termes techniques et scientifiques ne peut constituer aucune aseptie des messages. Les recettes dites de communication, concept très au gout du jour, ne sont que des leurres de manipulation des esprits.
  Tout humain est redevable vis à vis de la collectivité dont il est membre des mots qu’il utilise. Parce que chacun de ses mots construit une part de la réalité humaine que nous partageons dans leurs conséquences pour le pire, comme pour... le meilleur.

                                                   François-Marie Michaut
   
Os court :
«  Lorsque les mots perdent leur sens, les gens perdent leur liberté. »

 Confucius


 Lettre d'Expression médicale

LEM n° 1226  7 juin 2021   


               
                       
                                         

CONTRE NATURE  NATURELLEMENT                                 La nature, il paraît, aurait horreur du… vice, S’opposant, «  par nature »,  à ...