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25 août 2019

Trop, c’est trop
 (Exmed)

  Fin de récréation, il faut passer aux choses sérieuses. Ce site, n’ayant de comptes à rendre à personne, n’y va pas par quatre chemins. La mine des soins de santé, comme toutes les autres, n’est pas inépuisable. Alors, que faire ? La LEM 1134 vous propose : Sortir de la surmédication.

Bonne lecture, agissez, réagissez.

François-Marie Michaut
26-27 août 2019


Sortir de la surmédicalisation (LEM 1134)

                    
                       
 
       Dans un article remarquable du Journal Internet de Médecine (JIM) du 24 août 2019  Aurélie Haroche fait un état des lieux bien documenté pour la France sur ce qu’elle diagnostique ainsi : « Surmédicalisation : une maladie pernicieuse» (1).
Quand on se lamente, dans les chaumières et à longueur de médias en mal d’inspiration, de la désertification médicale, une telle pathologie peut paraitre contradictoire. On aurait à la fois pas assez de médecins et trop d’utilisation de la médecine. Un tel paradoxe ne peut que mettre chacun mal à l’aise, on a besoin de clarté pour comprendre le monde qui nous entoure (2). 

Pourquoi et comment notre société s’est surmédicalisée ?
 Bien entendu, parce que depuis les origines d’Homo Sapiens, nos ancêtres n’ont jamais cessé de chercher à soigner ceux qui n’allaient pas bien. Les prêtres, sur tous les continents, y ont apporté leurs contributions majeures. Tout en conservant, réservée aux seuls initiés triés sur le volet, la connaissance des manières reconnues de soigner. La dénomination d’Hommes-Médecine dans la sphère chamanique en est un indice.
Nous n’oublions pas que chez nous, jusqu’au XVIIème siècle la médecine ne pouvait être exercée que par des clercs (3).
Puis Descartes vint et les sciences ainsi libérées explosèrent. Au point de nous faire croire que leur expansion sans cesse croissante avait le pouvoir de générer sans fin ce que des générations nommaient avec vénération : le Progrès. Cette croyance est insoutenable en 2019, tant nous sommes informés des effets destructeurs planétaires de nos initiatives techno-scientifiques.

       Un système en sur-régime

 En trois siècles, les progrès des connaissances médicales ont été fulgurants et incroyablement riches de retombées pratiques admirables. Une courbe exponentielle peut en figurer l’image. À une restriction près : nous n’avons jamais pu observer dans le réel quoi que ce soit qui y ressemble. La biologie est formelle : tout ce qui est vivant a un début, une croissance et une mort. Si la notion de système est une réalité, elle ne peut avoir qu’une structure circulaire. J’ai tenté d’aborder cette question complexe dans le texte court « Causalité linéaire, circulaire, ou «hélicoïdale» (4) . Toute explication linéaire n’est qu’une amputation de la complexité de la réalité que la science découvre un peu plus chaque jour. Attention aux redoutables simplificateurs, si bien évoqués par Paul Watzlawick, ils sont plus vivaces que jamais !


     -Dans un cycle, un point est indépassable

  Nos historiens nous l’ont bien dit. Toutes les grandes civilisations, quand elles ont atteint leur développement maximum, disparaissent. Finalement sans qu’on sache trop pourquoi.

        Notons que cette mort se produit exactement au moment où se manifeste la vitalité la plus remarquable, comme dans une sorte d’emballement, de bouquet final. J’aime bien, à ce sujet, parler de jardinage. Dans votre tondeuse à gazon, vous mettez une certaine quantité de carburant. Tout va bien, jusqu’au moment où vous entendez le rythme du moteur s’accélerer sans raison. Puis l’engin s’arrête : panne sèche. Ainsi finit tout cycle.

    Il ne peut en être autrement de la médicalisation de nos sociétés, aussi puissants soient les gigantesques intérêts qui sont en cause. Et qui font tout pour que rien ne change et que se poursuive ce « toujours plus» pour paraphraser l’essayiste François De Closets. 
Quelques esprits commencent à comprendre que ne pas entendre ce genre de STOP (5) envoyé par la réalité, c’est aller très vite vers un suicide collectif de notre biosphère. La course contre la montre la plus dramatique qu’ait connu l’humanité est en route. Notre petit monde médical n’en est qu’une petite partie constituante, il a son rôle à jouer.
 Aucun secours ne peut venir d’ailleurs que de nous-mêmes. 
Enregistrer que la devise olympique de Pierre de Coubertin ( Plus haut, plus fort, plus loin ) n’est que la signature de notre orgueil collectif,  aveugle à toute notion de système. 
  

   Rien n’est à casser (6), toute tentative de retour en arrière est encore une façon de ne pas comprendre que les cycles s’enchainent les uns dans les autres, les ruines des anciens constituant les briques fondatrices des nouveaux. Marquer volontairement le fameux STOP évoqué plus haut, c’est la seule manière de mettre en acte ce que nous dicte notre antique tradition médicale : Primum, non nocere, D’abord ne pas nuire.

                      François-Marie Michaut


Notes :

(1) Lien de l'article : https://www.jim.fr/medecin/jimplus/posts/e-docs/surmedicalisation_une_maladie_pernicieuse__179096/document_jim_plus.phtml



(2) Nicolas Sarkozy, quand il était le  Chef de l’État, pour répondre à une question complexe avait l’habitude de commencer son propos par la formule : « C’est simple, je vais vous expliquer...»

(3)Avec l’obligation de célibat qui va avec.


(4) F-M Michaut, 20 août 2018, LEM 1081  Exactement, il y a un an, hasard ou nécessité ?


(5) Onomatopée imagée empruntée aux travaux sur le Système des systèmes de Dominique Aubier



(6) La fameuse balance avantages-inconvénients impose l’évolution de chacune de nos merveilleuses inventions.


    
Os court ;


« La santé n’est qu’un mot, qu’il n’y aurait aucun inconvénient à rayer de notre vocabulaire. Pour ma part, je ne connais que des gens plus ou moins atteints de maladies plus ou moins nombreuses à évolution plus ou moins rapide.» 


 Jules Romains ( Knock, 1924)



Lettre d'Expression médicale

LEM n° 1134

 26 août 2019

https://www.exmed.org/archives19/circu1134.html
      

CONTRE NATURE  NATURELLEMENT                                 La nature, il paraît, aurait horreur du… vice, S’opposant, «  par nature »,  à ...