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02 mars 2015

Vive la médecine narrative LEM 902

    Lettre d'Expression médicale
LEM n° 902 http://www.exmed.org/archives15/circu902.html
       2 mars 2015

              
 
                                                           

                     Vive la médecine narrative                           

                                  Docteur François-Marie Michaut


      
L’image d’Épinal du médecin, formé par ses longues années d’études scientifiques à  devenir, pour pouvoir les soigner dans les règles de l’art, un observateur idéalement neutre et objectif de ses patients, a encore la vie dure.
Et pourtant, il y a longtemps déjà que les physiciens quantiques ont démontré que l’observation - donc la personne de l’observateur- influe sur le système observé. La physique quantique, au passage, n’est pas étrangère à la médecine de tous les jours. C’est grâce à elle que nous disposons, entre autres, du microscope électronique ou de l’IRM nucléaire en imagerie médicale.
 La neutralité supposée du médecin a été mise en pièces par de brillantes observations cliniques britanniques, au milieu du siècle dernier, par Michael Balint. Ce confrère anglais, d’origine hongroise, de son nom de naissance Mihàly Bergsmann, psychiatre et psychanalyste, était le fils d’un médecin généraliste de la communauté juive de Budapest. Son travail, qui a conduit à la remarquable création internationale des Groupes Balint, demeure, à ce jour, le seul éclairage profond sur l’importance considérable  dans tout exercice médical de la relation humaine entre le malade et son médecin. Cette mise en question de la personne même de chaque médecin a probablement été trop novatrice en son temps, donc trop dérangeante. La pensée de Balint est demeurée marginale dans la formation initiale comme dans le perfectionnement professionnel des praticiens en exercice. Avoir raison trop tôt, en médecine comme ailleurs, ne veut certainement pas dire qu’on a tort !
Sandrine Cabut, médecin dermatologue à Paris et journaliste reconnue, a publié, dans Le Monde du 18 février 2015, un article remarquable : « Plus d’écoute pour mieux soigner». http://www.lemonde.fr/sciences/article/2015/02/16/plus-d-ecoute-pour-mieux-soigner_4577628_1650684.html

Elle nous raconte comment le concept de médecine narrative, importé des États-Unis, fait l’objet d’une expérience de formation d’un nouveau type auprès de jeunes étudiants en médecine de Paris-Descartes. Citons les noms des courageux enseignants porteurs de cette innovation prometteuse . François Goupy, professeur de santé publique, inspiré par les travaux de Rita Charon, interniste de l’Université de Colombia (New-York), et Luce Condamine, pédiatre et chargée de travaux dirigés de médecine narrative.

La médecine narrative ( Narrative Based Medicine ou NBM) est exactement le contrepoids de la déjà célèbre en France BEM ou médecine fondée sur des preuves. Toute médecine, à quelque titre qu’on y soit impliqué, est bien entendu une réalité. Pour en prendre conscience chacun est conduit à en faire son propre récit. Celui-ci peut rester intérieur, avec tous les dégâts possibles de cette rencontre jamais neutre.
Ce récit subjectif peut aussi être donné à partager avec un ou des autres. C’est le principe des groupes Balint de médecins évoqués plus haut.
La subjectivité du soignant - tout comme celle du soigné- au lieu d’être considérée comme un obstacle à éliminer devient le ciment indispensable de toute rencontre thérapeutique. Elle mérite donc d’être considérée, dès le début de la formation médicale, avec le plus grand respect et la plus extrême attention. Elle doit être cultivée soigneusement par tous.
Comment ne pas approuver sans réserve cette innovation pédagogique quand on tente de faire vivre un espace virtuel portant le titre assez parallèle d’Expression médicale ? Car, c’est une initiation à leur propre expression médicale que vivent ainsi, et semble-t-il avec un franc succès, les étudiants de cette faculté parisienne.
   Le danger, à mes yeux, serait que cette médecine narrative demeure une expérience limitée à la période des premiers contacts avec des malades et des soignants. Une teinture initiale n’est pas suffisante. Elle n’est qu’un début. Ce que j’ai cru percevoir, d’abord dans mon ancienne pratique professionnelle multiforme, puis dans mes travaux pour ce site depuis 1997, c’est que toute médecine, de la naissance à la mort de chaque être, pour ne pas perdre toute humanité doit demeurer narrative. 

   À ce moment là, mais seulement à celui là, toutes les merveilles techniques et scientifiques, dont nous sommes justement si fiers, prennent tout leur sens. Car, dans cette optique, on ne perd jamais de vue qu’on est là, avant tout, pour prendre soin des autres. Pour les soigner avec toutes nos capacités, celles liées au langage, n’en déplaise aux cyniques de service, n’étant pas les plus négligeables.
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Note : Tous mes remerciements vont à la personne inconnue qui a repéré l’importance du sujet traité par l’article du Monde, et à celle qui m’a fait parvenir l’information en pensant qu’elle pouvait m’intéresser.   
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Os Court :
«En médecine, la mode change aussi souvent qu’en haute couture. Le médicament miracle d’aujourd’hui sera le poison mortel de demain.  » 

      Groucho Marx 
 
















22 février 2015

Tirs à Blanc 
 BLANCHIMENT, LEM 901

Lettre d'Expression médicale n°901 du 23 février 2015 

 Tirs à Blanc 
 BLANCHIMENT              

                                                
                                 Jacques Grieu


    

Sont-ce mes cheveux blancs ? Je crains fort les nuits blanches
Et je suis blanc de peur quand mes rêves s’enclenchent …
Je me revois blanc bec, au fond de ma mémoire :
Le passé a des blancs qui sont parfois bien noirs !
A trop boire de blanc, les nuits sont avinées ;
L’alcool n’est pas moins blanc quand il rougit le nez.

L’enfant noir, l’enfant blanc : il est rouge leur sang !
Et c’est, de ce coté, blanc bonnet bonnet blanc.
Chou blanc ce serait faire à chercher différence :
Les blancs de ces discours sont comme des silences …
Quand les Verts voient tout rouge, alors, ils votent blanc :
La couleur politique est un sujet …  troublant !

Rien n’est jamais tout blanc dans les meilleurs desseins ;
Brandir le drapeau blanc est souvent assassin.
Un mariage blanc en fait voir cent couleurs ;
 Le meilleur papier blanc vient de chiffons pollueurs !
Le savon le plus noir lave bien le plus blanc,
Mais le plus blanc que blanc est souvent décevant.

L’optimiste bien né voit blanc ce qui est noir,
Et dans le blanc des yeux vous niera ses déboires.
Il voit de but en blanc le côté bénéfique ;
C’est le chevalier blanc pour le neurasthénique.
Connu tel le loup blanc pour entrer est assez,
Et aussi patte blanche est assez pour passer.

J’aime la gelée blanche, en semaine ou dimanche
Pour m’aller promener quand j’ai la carte blanche.

Comme dans le poulet, le blanc est meilleur choix,

Le plus fort du poème est le blanc qui se voit.
Rimer ne suffit pas à avoir un blanc-seing ;
Contre la page blanche, il faudrait un vaccin !



  
Os Court :
«    Le poème n’est point fait de ces lettres que je plante comme des clous, mais du blanc qui reste sur le papier. » 

      Paul Claudel


 

16 février 2015

Trente puissance deux, LEM 900

    Lettre d'Expression médicale
LEM n° 900
http://www.exmed.org/archives15/circu900.html
    16 février 2015

              
 
      
                                            

                                             Trente puissance deux
                                               LEM numéro 900


                                Docteur François-Marie Michaut



    Même au lendemain d’un vendredi 13 adulé des uns autant qu’honnis  par les autres, malgré notre culture rationaliste, les chiffres gardent leur charge symbolique. Sans détour, cela me fait tout drôle d’écrire en ce moment le numéro 900 de la Lettre d’Expression médicale. À raison d’une chaque semaine, cela commence à faire une durée d’existence non négligeable : presque la majorité légale. Pour un gâteau d’anniversaire, nous sommes tous d’accord, cela devient difficile de souffler toutes les bougies en une seule fois.

Souvenons-nous. La LEM a vu le jour en 1997. Au départ, ce fut un simple bulletin envoyé par fax à quelques médecins qui s’étaient retrouvés à l’initiative du regretté Jacques Blais au siège parisien de la revue «Le Généraliste». Le gros titre de la une précisait : «Dix généralistes en quête d’avocat». Il s’agissait de faire connaître publiquement ce que pensaient des praticiens de terrain de la réforme de la sécurité sociale prise par décret (donc sans passer par le parlement) par Alain Juppé, alors premier ministre. Nous étions très inquiets pour l’avenir de la profession et la qualité des soins de santé, alors qu’aucune voix ne s’élevait pour contester ce prétendu sauvetage d’une sécurité sociale dèjà économiquement comateuse.
Pour le dire sans détour, nous n’avons eu aucun retour de cet appel. Et personne ne s’est proposé pour prendre le rôle d’avocat. Alors, nous avons décidé, en fait avec le seul Jacques Blais, alors éditorialiste du Généraliste, et médecin de famille dans une banlieue francilienne ouvtière, de prendre la parole et de nous exprimer ouvertement sur la place publique. Les organisations syndicales, ne parvenant pas à canaliser ce mouvement, ont rapidement disparu de l’horizon.

Puis, pour des raisons essentiellement pratiques et ... économiques, j’ai fait le choix de plonger dans l’univers balbutiant de l’internet pour tenter d’assurer une diffusion plus large de cette lettre hebdomadaire.
L’expérience a été presque aussi pleine de difficultés que riche de satisfactions. L’établissement de nouveaux contacts, et bien au delà de nos frontières, plus ou moins durables et plus ou moins enrichissants pour mon gout, a été, et demeure encore, une aventure personnelle exceptionnelle. Que tous ceux qui ont accepté que ces échanges s’établissent et qui ont apporté (toujours bénévolement, c’est admirable dans notre époque marchandisée à l’extrême) leur contribution à Exmed trouvent ici la manifestation sans réserve de toute ma gratitude.

Quand hier, samedi 14 février, deux attaques à l’arme de guerre ont été menées à Copenhague contre une conférence sur la liberté d’expression et contre un lieu de culte juif, un terrible message se répète. Des esprits qui cherchent à imposer leur domination absolue ne voient finalement que deux ennemis qu’il faut détruire en les mettant étrangement sur le même plan : la liberté d’exprimer sa pensée personnelle et le message spirituel dont le peuple juif (croyant ou non) est (qu’il le vueille ou non) le porteur et le transmetteur.
C’était exactement ce que disait sans le dire les acteurs de la tragédie parisienne de Charlie Hebdo et de l’Hyper cacher. Cacher, en hébreu, je ne l’ai pas entendu dans les commentaires, cela veut dire simplement correct. Détruire ce qui est hyper correct, c’est une épouvantable et suicidaire perversion des esprits.

Alors, les lieux, aussi modestes soient-ils, où peut s’exercer la liberté d’expression de ceux qui les fréquentent prennent une toute autre valeur pour notre avenir à tous. Cela n’a strictement rien à voir avec une quelconque croyance religieuse, scientifique ou philosophique.
Tant qu’elle sera lue, la LEM, toujours à sa manière et sans se rallier à aucun drapeau, continuera son petit bonhomme de chemin pour que soit manifeste une voie (parmi des milliers d’autres possibles) d’expression médicale libre et indépendante.




                     

  
Os Court :

«   C’est difficile d’imaginer comment ce sera arrangé ici dans 900 milliards d’années, déjà qu’en dix ans la plupart des bougnats a disparu, t’as plus que de grandes brasseries. » 


     Jean-Marie Gouriot (Brèves de comptoir 1988)














01 février 2015

Auschwitz et le devoir d’intelligence
 LEM 898

 Lettre d'Expression médicale
LEM n° 898 http://www.exmed.org/archives15/circu898.html
   
2 février 2015

              
 
                                                           
  

                Auschwitz et le devoir d’intelligence
                               

                                Dominique Blumenstilh-Roth



  
Triste anniversaire que celui des 70 ans de la « libération» par l’Armée Rouge du camp d'Auschwitz.
Beaucoup de commémorations officielles, où tout le monde, ou presque, s'accorde à dire « Plus jamais cela ».
Utile et indispensable rappel au devoir de mémoire, alors que les derniers témoins directs se font de plus en plus rares. Il faut cependant aller encore plus loin.
   Car, 70 ans après, qu'avons-nous retenu du drame ?
Les images en sont projetées sur les écrans de télévision, suscitant souvent l'indignation devant pareil crime.
D'autres au contraire, sont fascinés et seraient assez tentés de renouveler l'expérience, du côté des bourreaux, bien sûr.

   C'est pourquoi la commémoration doit nécessairement se compléter d'un devoir d'explication. Trois questions s’imposent alors :

- Avons nous compris ce qu'est le nazisme ?    
- Savons nous exactement pourquoi le judaïsme était visé ?
- Avons nous compris le sens de la Shoah ?

   Plus que jamais, le devoir de mémoire doit s'accompagner d'un devoir d'intelligence pour saisir l'enjeu de la Shoah. C’était un projet démoniaque d'extermination du judaïsme caractérisé par le fait que c’est le peuple juif qui a reçu l'alphabet révélé à Moïse au Buisson Ardent. Exterminer un à un chaque porteur potentiel de cette connaissance, c'est anéantir le projet de la Création.
C'était cela, l'ambition de la « volonté de Puissance » face au Verbe.
Les Nazis ont ils réellement perdu la bataille ?

   La question reste toujours posée, car l'antisémitisme n'a pas dit son dernier mot.
Le projet d'exterminer Israël est toujours d'actualité… si j'en crois les prétentions de certaines personnalités du Moyen-Orient.
    Qu'est ce qui motive leur haine ?

  Il existe un livre essentiel de Dominique Aubier Réponse à Hitler , écrit en 1979, qui explique le projet satanique des Nazis.
Et qui propose la réplique qu'il convient de lui infliger. Y compris aux néo-nazis qui semblent, de nos jours, retrouver certaines ardeurs.


    Le temps est venu aussi de comprendre que le génocide hitlérien n'était pas une invention particulière à une époque historique récente. C'était la répétition de la tentative pharaonique de destruction bien connue dans Exode. Son programme ? Éliminer le peuple du Verbe afin d'imposer un projet d'éradication de la civilisation même. Il s’agit alors de nier le verbe, nier la Création, installer le régime du matérialisme pur où la pensée libre serait remplacée par l'esclavage et la servilité au service des Maîtres de la barbarie.

   Et que penser de l'épisode de la Reine Esther qui, en son temps, il y a 2600 ans, conjura le génocide organisé par Assuérus, le roi d'Assyrie, et son ministre Hamman ? Etrange coïncidence que le mentor d'Hitler, son éditeur, et sans doute co-auteur de Mein Kampf, s'appelait précisément Aman. Troublante analogie de nom suggérant le lien transgénérationnel de la pulsion génocidaire ? (Lire à ce sujet : Le Code d'Esther, de Bernard Benyiamin, édition First).

   Tout cela pourrait-il recommencer ?
Oui. Et très facilement. Car il ne suffit pas d'affirmer, comme le fait François Hollande, la main sur le cœur, que la République se porte garante de la sécurité des confessions. La même République, aujourd'hui magnifiquement solidaire des victimes, est soumise aux fluctuations de l'opinion, et nous savons bien qu'elle change 60 fois par minute. Qu'elle est capable du meilleur comme du pire, et que le pire vient aisément lécher les appétences politiques. L'indignation d'aujourd'hui ne garantit en rien le sentiment de demain.

   Dès lors, il faut compter sur un acte de conscience supérieur, afin de produire l'antidote du crime. Le dénoncer, ce n'est pas suffisant. Car dénoncer l'horreur… c'est encore la montrer, sans y apporter de remède.

    Le remède ? Ce serait d'accompagner les témoignages, les documentaires d'un discours où l'esprit ait sa place. Où le véritable enjeu soit expliqué sans détour : la haine viscérale hitlérienne, d'essence métaphysique, désirant anéantir le projet du Créateur pour lui substituer la tyrannie de la « Puissance ». Il faut avoir le courage de regarder du côté de la métaphysique pour comprendre l'ambition des nazis : projet satanique dont les historiens décrivent les processus, mais n'en détectent pas l'identité. Face au satanisme (oui, le mot doit être prononcé parce qu'il existe), la seule solution c'est de réaliser une puissante avancée spirituelle, où l'humanité renoue avec l'esprit.
   On me dira que je vais chercher des explications dans la métaphysique et que ce n'est pas très rationnel. Je réponds que c'est avec beaucoup de rationalité et de méthode que les nazis ont exterminé leurs victimes. La méthode rationnelle qui croit détenir une explication de la Shoah ne fait que raconter les événements mais n'en donne pas la cause ontologique profonde.

  Renouer avec l'Esprit. Je ne dis pas avec la Religion. Quelle qu’elle soit,  toute confession n’est qu'une façon d ‘interpréter cet esprit. Je précise bien : il nous faut renouer avec l'Esprit et ses lois. 
Le retour à la connaissance des lois de l'Esprit, si longtemps jugée comme dépassée par la modernité ou hors de portée des cerveaux humains, me paraît être la seule garantie possible d’un avenir vivable.
Mais je n'ai entendu personne en parler à la télévision, parce que le mot « Esprit » fait peur.


   Pour que ces horreurs ne recommencent jamais, il est indispensable de comprendre enfin, avec son intelligence personnelle, le sens profond de la Shoah.

 

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Livres conseillés par l’auteur

Dominique Aubier :
— Le cas juif
— L'Urgence du Shabbat
— Réponse à Hitler
 Dominique Blumenstilh
- Esther, la Délivrance d'Israël

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Os Court :

«   Il y a un terrible problème avec le cerveau. L’intelligence n’est pas nécessairement garantie à la livraison de l’organe. » 

     Georges Raby ( journaliste et poète québécois)






  








25 janvier 2015

Cause toujours CAUSALITÉ, LEM 897

Lettre d'Expression Médicale n° 897
Sur le site EXPRESSION MÉDICALE

26 janvier 2015


                                                           
 Cause toujours
 
                                                         CAUSALITÉ
                               

                                 Jacques Grieu


   


Petites sont les causes et grands sont les effets
Si les effets sont grands, c’est donc qu’ils sont surfaits.
Et des effets trop grands souvent habillent mal.
Un tailleur mis en cause aurait dit : c’est fatal,
La cause est trop petite et rend l’effet bancal.
Il aurait gain de cause au moindre tribunal.
La cause est entendue ; sera-t-elle écoutée ?
En tout état de cause, les effets sont restés.

La cause du divorce, elle est le mariage ; 
Ce n’est pas moi, c’est l’autre, est un vain caquetage …
Un danger fait moins peur quand sa cause est connue,
Alors, cause cachée excuse tout abus ?
La cause a peu d’effet si c’est mal énoncé ;
On n’est jamais puni pour avoir mal pensé.
L’effet de la colère est pire que sa cause
Et la cause vénielle, en effet, elle explose.

On peut fermer les yeux pour cause de décès ;
C’est là question de cause ou d’effet angoissé  ?
Car de cause à effet, les faits restent les faits.
Fait et cause je prends pour les insatisfaits.
Nul ne peut être juge en sa cause privée,
Et la raison pour soi n’est pas cause prouvée.
Mon cœur et mon esprit sont mes doubles prisons,
Et je demeure, hélas, ma cause et ma raison …


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NDLR : La citation finale est de Mihàli Babits, écrivain et poète hongrois 1883-1941, membre de la revue d’avant garde Nyugat (Occident)

  

           
 
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Os Court :
«   La croyance au rapport de cause à effet est la superstition.»  

    Ludwig Wittgenstein ( philosophe autrichien, puis britannique 1889-1951)


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19 janvier 2015

Un "JE SUIS" à ne pas rater. LEM 896



Lettre d'Expression médicale
LEM n° 896 http://www.exmed.org/archives15/circu896.html
   
19 janvier 2015

              
 
                                                           
                  Un « JE SUIS ...» à ne pas rater
                               

                                Docteur François-Marie Michaut  

   Le 11 janvier 2015, des millions de gens défilant ensemble dans les rues, dans les campagnes, à Paris et toutes les villes de France, des cortèges semblables dans de nombreux pays du monde, quel évènement ! Que ces rassemblements n’aient donné lieu à aucune violence relève de l’inédit.
Que chaque participant, ou presque, de sa propre initiative ait tenu à brandir un  « Je suis Charlie », avec un certain nombre de variantes personnelles, mérite une grande attention.

Ce ne sont pas les corps constitués, les groupes organisés, les responsables religieux, philosophiques, syndicalistes, associatifs, les leaders culturels ou les ténors des médias qui ont pris cette initiative. Juste la trouvaille pleine de talent d’un internaute qui n’a pas oublié Kennedy à Berlin. Comme par génération spontanée, ces sortes de cartes d’identité montrées à tous sont apparues dans un ensemble totalement hors de nos habitudes. Le fait que les mots juif, policier, musulman, au féminin comme au masculin, que le «je» cherche parfois à devenir le «nous» se voulant rassembleur, soient affichés n’a entrainé  dans les rues aucun conflit apparent.

Il ne reste alors, pour qui veut pousser sa vision d’une journée sans aucun précédent connu, qu’à se demander ce que veut dire cette revendication de reconnaissance d’identité quand, oubliant un instant Charlie et tous les autres, on ne prend en compte que le JE SUIS.
Je l’écris volontairement en lettre capitales pour signifier qu’il s’agit d’un cri, silencieux mais puissant. Ce n’est pas  une affirmation douce ou un banal verbe auxiliaire. J’affirme mon existence, ce n’est pas rien.
Qu’il ait été figuré en lettres blanches sur fond noir souligne la gravité de la déclaration.

Affirmer aux yeux de tous sa volonté personnelle d’être un humain capable de choisir par lui-même sa propre conception de la vie et des rapports aux autres n’est pas un exercice habituel. Nous sommes tellement  rodés à n’être que des numéros, comme pour la sécurité sociale, les administrations, des électeurs pour les politiques, des consommateurs pour les vendeurs, des fidèles ou des infidèles pour les organisations religieuses, ou intellectuelles ! L’individu, celui qu’on ne peut pas couper en morceaux, est une espèce en voie de disparition. L’individualisme est partout vilipendé, point de salut hors des groupes constitués semblait-on nous faire croire jusqu’au 11 janvier 2015.
Alors, retour de bâton magistral dans le sillage involontaire du fameux Charlie et de ses voisins d’affichage. Je prends conscience que je suis, sans le savoir le plus souvent, le porteur de valeurs d’ordre métaphysique, pour ne pas employer le terme  sulfureux de spirituel. Je dis sans me cacher aux yeux si facilement moqueurs des autres, que c’est là ma colonne vertébrale et que je ne donne à personne le droit d’en disposer à sa guise. Peu importe que certains y accolent de grands mots, de grands principes, l’essentiel n’est pas là.

Voilà ce que j’ai cru comprendre avant que le rouleau compresseur des commentateurs de tous les bords ne produise une bouillie intellectuelle des plus indigeste.

Une fois encore, même si elle n’est pas pleinement mise en avant, la question du libre arbitre  de chaque humain refait surface. Mais qui se soucie encore de lire, Maïmonide le médecin, Thomas d’Aquin le théologien,  Spinozza le philosophe, parmi bien d’autres,  quand les images et les bavardages factuels nous inondent ?
Alors au lieu de nous précipiter sur des mesures matérielles pour «lutter contre» notre peur, perdons tout le temps nécessaire pour prendre la mesure de ce que le réel nous a dit à tous.

   Au moment de mettre un point final à cette lettre, me revient en mémoire un avis d’internaute, il y a quelques semaines, me reprochant -très justement - de ne pas aller assez loin dans mes conclusions. Alors, allons-y.
Oser dire «je suis», ce n’est pas une forfanterie gratuite, ce n’est pas tenter de faire croire à qui que ce soit que je suis quelqu’un... d’important. C’est affirmer que je suis conscient d’avoir une existence propre, et à nulle autre semblable, qui mérite d’être respectée. Je n’ai pas à me prendre la tête afin de devenir ce que les autres (famille, religion, métier, tradition, culture etc...) me poussent, parfois avec violence, à être. M’accepter comme je suis, sans me juger, exactement comme Socrate disait à ses disciples « connais-toi toi-même».
Cette prise de conscience ne peut avoir aucune conséquence pratique sur notre avenir le plus quotidien ? Bien malin est celui qui peut le parier. 
Qui d’entre nous, il y a seulement un mois, aurait misé un kopeck sur le retentissement mondial fulgurant d’un journal marginal brûlant ses dernières cartouches financières, faute de lecteurs ? 
Cet hebdo agonisant se nommait Charlie, personne ne l’a oublié. Nul ne sait à cette heure quel sera son avenir et... le notre.




                 répondre    

  
Os Court :
«  Je suis celui qui est. » 

    Dieu à Moïse (L’Exode)

16 janvier 2015

La Connaissance pour 2015 LEM 894

    Lettre d'Expression médicale 894
  http://www.exmed.org/archives15/circu894.html

LEM n° 894 Édition courriel    4 janvier 2015

              
 
                                                           
                         La Connaissance pour 2015
                               

                                Docteur François-Marie Michaut


   Franchement, les rétrospectives rituelles m’ennuient autant que les bilans annuels ou les inventaires de janvier. Je vous propose de sauter ensemble tous les détails pour aller droit au but.

    Qu’est-ce qui m’a le plus frappé dans ce qui s’est passé en 2014 ?
Les derniers mois ont été effarants, avec l’acharnement de destruction des écoles un peu partout dans le monde. De la banale vandalisation de lieux d’enseignement en Europe à l’enlèvement de lycéennes en Afrique pour les réduire en esclavage, sans oublier, hélas, les massacres systématiques effroyables perpétrés au Pakistan, en Syrie et ailleurs contre des enfants, des professeurs et des étudiants, les actes meurtriers à grand spectacle, une haine meurtrière s’est déchainée.

   Une tentative de compréhension en faisant l’effort de penser de façon systémique (et non, comme nous en avons l’habitude, en termes de causalité linéaire) n’est pas sans intérêt. Cela n’enlève rien à l’horreur que chaque personne peut légitimement ressentir face à de semblables atrocités, et ne saurait constituer une quelconque justification de ces crimes contre l’humanité toute entière, sans la moindre restriction.
Quel peut bien être le lien commun à toutes ces destructions volontaires de diverses origines de notre fragile humanité ?

   Première précaution à prendre, pour ne pas se laisser happer par des polémiques tournant en boucle. Ne pas s’arrêter aux discours des différentes parties, soit s’obstinant dans leur parti, souvent sous une bannière prétendue religieuse, soit se sentant le droit de parler au nom de la pensée globalisée de la planète entière.

La cible visée par les auteurs d’actions pour répandre la terreur dans les esprits du monde numérique tout entier est univoque. Il n’est qu’une cible dangereuse pour eux. Ce sont les écoles. Il faut les détruire, ou, à défaut, contraindre les jeunes à ne pas les fréquenter.
La connaissance est devenue le plus grand ennemi des mouvements les plus terroristes. Contraindre des populations entières à retourner, ou à demeurer dans l’obscurantisme, voilà qui doit faire retourner plus d’un Voltaire dans sa tombe !
    Puissent tous ceux qui souhaitent lutter contre les mouvances extrémistes  les plus sanguinaires ne pas oublier ce message. Le plus grand ennemi des terroristes, en fait le seul vraiment dangereux pour leur avenir, infiniment plus que tous les actes de guerre militaire ou économique, c’est la connaissance sous toutes ses formes. Donc, ce qui, à mes yeux, mérite de prendre le nom de la Connaissance avec une majuscule. Tout ce que les cerveaux humains de tous les temps et de tous les lieux ont été capables de comprendre et de construire, sans aucune exception, exclusion ou même hiérarchisation constitue notre bien le plus précieux. Personne n’a le droit, ni le pouvoir de détruire la Connaissance.

    Il nous faut aller au delà des réactions émotives qui sont des façons, calculées avec cynisme par ceux qui les provoquent, de manipuler les opinions publiques. Il ne faut surtout pas baisser les armes devant ceux qui veulent imposer leur système par la violence et la terreur des populations. Peu importe qu’Allah - ou tout autre principe suprême - soit mis en avant ou non. Aussi noble et vénérable soit l’invocation, tout prétexte transcendant n’est qu’un alibi vieux comme le monde pour assurer sa domination sur les autres.

   La victoire est assurée, tôt ou tard, pour ceux qui savent faire fonctionner leur cerveau en favorisant sans faiblesse le fonctionnement des têtes du plus grand nombre. Le mouvement de partage, encore inédit dans l’histoire de l’humanité (imprévisible il y a seulement un demi siècle), des connaissances de tous les ordres à travers toute la planète avec le numérique est irréversible. Une ère culturelle planétaire nouvelle est en action.
     L’information, au sens le plus large du mot - celui de la mise en forme d’une réalité - se révèle être une forme encore négligée d’énergie dans tout l’univers. Nous en mesurons aisément les faiblesses et les détournements. La puissance de cette énergie nous est encore difficilement perceptible.
      Ne manquons par pour autant d’en exploiter avec enthousiasme et opiniâtreté toutes les richesses actuelles et futures.
Travailler sans faillir pour la Connaissance est la seule réponse intelligente possible à tous les terrorismes et à tous les asservissements de notre belle terre. Si nous n’avons ni ce courage, ni ce talent, sachons au moins respecter les efforts de ceux qui s’y consacrent.

 



                                  Retrouver la confiance.
  

                                 Restaurer la conscience.
  
 
                          
                                Renforcer la compétence.


  
Os Court :
« La liberté commence où l’ignorance finit. » 

    Victor Hugo
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CONTRE NATURE  NATURELLEMENT                                 La nature, il paraît, aurait horreur du… vice, S’opposant, «  par nature »,  à ...